À Lyon, la mairie subventionne un théâtre privé : "Je ne peux pas financer des entreprises", assurait pourtant le maire

Alors qu'elle assure depuis plusieurs mois qu'elle ne peut juridiquement pas aider des entreprises privées, notamment les commerces en difficulté, la Ville de Lyon vient d'accorder une subvention de 50 000 € à un théâtre privé.
C'est une délibération qui n'a étonnement pas fait réagir l'opposition, et qui pourrait faire tomber de leur chaise les commerçants lyonnais. La Ville de Lyon a voté ce jeudi une délibération actant le versement d'une "aide exceptionnelle" de 50 000 € au théâtre-comédie Odéon, un théâtre privé. Plus précisément, une société par actions simplifiées, qui accueille 60 à 70 000 personnes par an pour un chiffre d’affaires d’environ 1,5 million d'euros.
Une décision étonnante alors que le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet rappelle à l'envie depuis plusieurs mois que la collectivité qu'il dirige ne dispose d'aucune compétence en matière d'aide aux entreprises. "De manière juridique, en tant que maire, je ne peux pas financer des entreprises", expliquait encore l'édile dans une interview accordée à 20 minutes, interrogé sur la possibilité d'indemniser les commerçants touchés par les travaux.
Fin mars, dans l'hémicycle, Nathalie Perrin-Gilbert proposait par exemple de créer un fond de soutien aux commerçants abondé par les recettes générées par l'extension du stationnement payant et les verbalisations. Là encore, on rappelait dans les rangs de la majorité que seule la Région Auvergne-Rhône-Alpes dispose de la compétence permettant de verser directement de l'argent à des commerces.
La Ville de Lyon indique ainsi dans sa délibération que "le théâtre se trouve ainsi en situation très critique et serait en danger sans son nouveau projet entrepreneurial qui permet l'apport de nouveaux partenaires économiques". Pour rappel, le théâtre dirigé par Julien Poncet s'est récemment associé avec le groupe de presse Rosebud (propriétaire de Tribune de Lyon et Lyon Décideurs notamment). Il proposera ainsi des rendez-vous axés sur l'information.
L'exécutif, a donc finalement trouvé un moyen d'apporter un financement à cette entreprise privée, "pour soutenir la diversité culturelle, afin que ce théâtre privé de centre-ville puisse poursuivre son activité". La mairie a ainsi sollicité la Région Auvergne-Rhône-Alpes, seule compétente en matière d'aides aux entreprises, pour obtenir son accord préalable au versement d’une aide économique. Cette dernière peut en effet déléguer l'octroi d'aides aux communes.
En mai, la conseillère municipale d'opposition, Béatrice de Montille avait profité d'une délibération portant sur une convention similaire visant à soutenir les acteurs de l'économie sociale et solidaire. "Puisque vous êtes prêts à contractualiser avec la Région pour soutenir les structures de l’ESS, pourquoi ne pas également solliciter des aides économiques directes pour nos commerçants, aujourd’hui en grande difficulté", avait-elle lancé. Lors des émeutes qui avaient impacté de nombreux commerçants de la Presqu'île, la Ville avait débloqué des fonds qu'elle avait accordé à des organisations professionnelle, lui permettant de rester dans le cadre de ses compétences.
Sur le fond, l'octroi d'une aide à un théâtre singulier faisant vivre une offre culturelle en Presqu'île est un choix politique qui peut être justifié au titre de l'exception culturelle française. Néanmoins, le maire Grégory Doucet devra désormais assumer son choix politique (respectable par nature) de ne pas indemniser les commerçants mis en difficulté par les travaux, sans pouvoir se réfugier derrière un argument juridique.
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